LA pAge noire

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dimanche 30 septembre 2018

L'été s'étirait doucement





L’été s’étirait doucement dans des couleurs époustouflantes, comme pour laisser imaginer que les choses n’étaient pas tout à fait terminées, laisser croire qu’il ne pointait pas son nez ailleurs. Les gens avaient tendance à oublier ce genre de détail. Les filles étaient presque nues, les gars sur les chantiers essuyaient de grosses suées sur leur front, tout le monde faisait comme si rien n’allait bouger, comme si la fin des temps n’était pas pour demain. Mais l’été tirait sa révérence. Pour de vrai. Ceux qui se plaignaient encore de ces lambeaux de chaleur ne semblaient pas tellement se rendre compte de ce que tout ça nous réservait. L’infidélité programmée de l’été allait nous saisir d’un coup, nous tordre les os sans aucune pitié. Bientôt le froid crasseux, le vent, la brume allait coller à la peau, les pluies glacées allaient relever les cols, nous faire marcher les yeux baissés, les dents serrées, tout en espérant que le vie se souvienne un peu de nous. L’été foutait vraiment le camp, livrait ses derniers feux en entretenant l’illusion qu’il pourrait ne jamais finir, mais ses valises étaient faites, ses draps ailleurs sentaient le frais. Il n’était désormais plus très utile de croire en ses derniers feux. Il s’agissait de faire le dos rond, de regarder de l’autre côté des saisons.